Boris Lesoir

Sur les rivages de la Méditerranée,une gamine allait nager toute l'année,dans une petite crique,sur l'île du Gaou, sur la côte varoise.Elle  se baignait par tous les temps,même quand le Mistral se déchainait;elle nageait toujours avec un masque,un tuba et une paire de palmes.Elle adorait ,cette nature sauvage de ce petit bout de caillou balayé par les vents,l'odeur des embruns iodés,le goût du sel sur sa peau.Elle pouvait rester des heures,toute seule,heureuse,contemplative face à la mer,les goélands planant au-dessus d'elle.Dans l'eau,elle était comme un poisson,dans son élément,dans un autre univers,un monde aquatique magique,féerique.Elle plongeait de longues minutes,en apnée,entourée d'une multitude de poissons la connaissant; ils conversaient avec elle,ils communiquaient dans un langage qu'ils avaient inventé entre eux,par bulles interposés.Elle les caressait tendrement,quand l'eau était très froide,les poissons se collaient à elle,pour lui tenir chaud.Dans un trou,à une quinzaine de mètre de profondeur,se trouvait un vieux mérou,à qui elle rendait visite régulièrement.Il était magnifique,étonnamment coloré,il devait bien avoir plus de trente ans,énorme!Quand la saison des amours commençait,elle nageait vers le large,car c'est un lieu de reproduction des dauphins et de certaines baleines aussi;les dauphins la prenait avec eux,assise sur le dos d'un de ses compagnons de jeu,elle passait des moments inoubliables en leurs compagnies.Ils allaient rendre visite aux baleines ,qui leurs chantaient des chansons aux sonorités aquatiques,des mélopées aux accents magiques.Quand elle était fatiguée par tous ces jeux,un dauphin la ramenait sur le rivage.C'était aussi à cette période là,la saison de  la chasse,toutes sortes de poissons, du plus gros au plus petit se poursuivaient par milliers,l'eau bouillonnait à certains endroits,des bancs de thons jaunes,de sardines,de poissons volants,de dorades,de mulets de haute mer,de crevettes si nombreuses que l'on pouvait voir de grandes tâches roses se déplacer à la surface de l'eau.Camille,la gamine marine,rentrait chez elle,le sourire aux lèvres,épuisée par sa journée de rêve,pensant déjà à demain,à tous ses amis des fonds sous-marins.Le soir,elle s'endormait dans les bras de Morphée,des étoiles de mer dans les yeux,des coquillages incrustés dans les cheveux.La nuit elle faisait toujours le même rêve,elle était un cachalot blanc,naviguant sur tous les océans,sur toutes les mers;chaque nuit,elle découvrait de nouveaux archipels,de nouveaux atolls,de nouvelles espèces marines,inconnues dans les profondeurs abyssales.Le lendemain matin,elle se réveillait avec une odeur de marée,l'esprit encore somnolent ,la tête au fond d'un océan.Après avoir prise sa douche matinale,elle revenait à la réalité terrestre,prenait un petit déjeuner copieux,composé d'une soupe de poissons,de quelques oursins,d'une salade d'algues et du pain complet,avant de s'en aller vers l'école.Quand le maitresse de sa classe lui demandait,ce qu'elle désirerait faire plus tard,comme métier,elle pensait :je veux être un poisson,mais elle répondait:je serai skipper sur une goélette,je ferai le tour du monde à la voile,je serai reporter spécialisée du monde marin,ou bien océanographe.A l'âge de seize ans,elle parti sur le dos d'une baleine et on ne la revit plus.